RAYON LIVRES

Alexandre Grine : L’Ecuyère des vagues. Editions L’Age d’Homme.

Traduit du russe par Marion Graf. Préfacé par Georges Nivat

Dans les lettres russes, les romans d’aventures sont une rareté ; une exception, un nom: Alexandre Grine, un véritable classique du genre. L’Ecuyère des vagues est la plus populaire de ses œuvres.

Harvey, le héros de ce livre, ose croire au bonheur et se risquer à sa conquête ; suivant l’appel d’une voix mystérieuse, il s’embarque sur un beau voilier. Périls, épreuves, amour et coïncidence mystérieuses l’attendent dans la rude compagnie des marins et dans une ville en fête, sous des tropiques imaginaires. La pulsation de l’océan, l’exubérance de rivages et de villes exotiques, légendes et mascarades nourrissent ce récit d’une poésie à la fois grave et légère, une poésie de la lumière, dans toutes ses variations. En peinture, à travers un mouvement de foule, un geste, un détail significatif, l’auteur nous fait voir  ce monde imaginaire, comme saisi sur le vif ; en conteur subtil, il ménage le «suspense», dispose les motifs symboliques, et mène le lecteur du frisson à l’indignation, du rire à l’attendrissement – jusqu’à une énigme, aux portes du rêve : qui est-elle au fond, cette Ecuyère à la main secourable, qui ne craint ni les requins, ni l’abîme ? Un bateau ? Une légende ? Une vision ? Une statue ?

Ecrit en Crimée en 1926, ce roman date de la période la plus sereine de la vie de l’écrivain. En effet, depuis son enfance à Viatka, et presque sans répit, Alexandre Grine (1880-1932) a connu la misère la plus effroyable ; déçu dans son rêve de devenir marin, tour à tour chômeur, mendiant, chercheur d’or, soldat, révolutionnaire (en 1905), vagabond, il connait les bas-fonds et la faim, la déportation et la prison tsariste. Très tôt, pour cet éternel « marginal », grand admirateur d’Edgar Poe et Mérimée, la littérature est un refuge, où il peut donner forme à son immense capacité, miraculeusement intacte, de rêve, de pureté, de beauté, d’héroïsme.

Comment ne pas croire Grine lorsqu’il montre que, pour ceux qui savent le saisir, le bonheur échappe aux éclaboussures de la vie, et qu’il à la force fragile d’une belle lumière ? Comment ne pas le croire ? Il l’a prouvé lui-même ?

L'interview avec Marion Graf à lire ici.

A propos de l’auteur

Nadia Sikorsky

Nadia Sikorsky a grandi à Moscou où elle a obtenu un master de journalisme et un doctorat en histoire à l’Université d’État de Moscou. Après 13 ans passés au sein de l’Unesco, à Paris puis à Genève, et avoir exercé les fonctions de directrice de la communication à la Croix-Verte internationale fondée par Mikhaïl Gorbatchev, elle développe NashaGazeta.ch, premier quotidien russophone en ligne, lancé en 2007.

En 2022, elle s’est trouvée parmi celles et ceux qui, selon la rédaction du Temps, ont « sensiblement contribué au succès de la Suisse romande », figurant donc parmi les faiseurs d’opinion et leaders économiques, politiques, scientifiques et culturels : le Forum des 100.

Après 18 ans en charge de NashaGazeta.ch, Nadia Sikorsky a décidé de revenir à ses sources et de se concentrer sur ce qui la passionne vraiment : la culture dans toute sa diversité. Cette décision a pris la forme de ce blog culturel trilingue (russe, anglais, français) né au cœur de l’Europe – en Suisse, donc, son pays d’adoption, le pays qui se distingue par son multiculturalisme et son multilinguisme.

Nadia Sikorsky ne se présente pas comme une "voix russe", mais comme une voix d’Européenne d'origine russe (plus de 35 ans en Europe, passés 25 ans en Suisse) au bénéfice de plus de 30 ans d’expérience professionnelle dans le monde culturel – ceci au niveau international. Elle se positionne comme médiatrice culturelle entre les traditions russes et européennes ; le titre de sa chronique, "L'accent russe", capture cette essence – l’accent n’étant pas une barrière linguistique, ni un positionnement politique mais une empreinte culturelle distinctive dans le contexte européen.

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