RAYON LIVRES

Dictionnaore de la philosophie russe. Eds. L'Age d'Homme, 2010

Essayer de comprendre les grandes constantes de la philosophie russe, c'est abandonner certaines représentations habituelles pour un lecteur occidental - non pas découvrir une différence au sens strict, mais une autre répartitions des centres d'intérêt.

Ce Dictionnaire contribue à situer la pensée russe par rapport à l’Europe, et cela dès les origines.
Depuis un démi-siècle, le regard porté sur la Russie ancienne  (XIe-XVIIe siècle) s’est transformé, permettant de donner toute sa place à une tradition spirituelle moins tournée vers le raisonnement que vers le silence, la contemplation, l’ascèse – tendance également présente en Occident, mais moins exclusive.

On sait qu’en Russie les contraints de l’histoire) régimes autoritaires, censure, emprise d’une idéologie totalitaire…) ont pesé particulièrement lourd. Elles sont proportionnelles à l’ampleur des questions suscitées.  Au XIXe siècle, à travers l’histoire d’institutions telles que les universités, on découvre une peur panique de toute pensée, considérée comme une menace pour l’ordre établie. C’est à cause de ces conditions d’existence que le manque d’une philosophie critique se fait sentir au moins jusqu’à la seconde moitié du XIXe siècle. Mais la faiblesse presque constante de la philosophie institutionnelle explique aussi, peut-être, la floraison de théories parfois très surprenantes, originales, non conventionnelles – tradition qui se maintiendra au XXe siècle, ou sous la chape de plomb du régime soviétique on découvrira un véritable foisonnement idéologique.

C’est au XXe siècle surtout (en URSS ou dans l’émigration) que la philosophie russe rejpint véritablement la conception occidentale de la philosophie. A coté du marxisme ou des vastes systèmes développant la notion d’unitotalité, on rencontre des phénoménologues, des existentialistes… qui, cette fois, ne sont pas les imitateurs. Certains rapprochements sont inattendus. On découvre ainsi que Pascal est au cœur de tout un domaine de la pensée russe.

Ce Dictionnaire fait écho à d’autres entreprises : à la monumentale Histoire de la littérature russe publiée chez A. Fayard, qui a montré que tout panorama un peu exhaustif de la culture russe ne peut ignorer sa philosophie ; au Vocabulaire européen des philosophes, qui a souligné l’apport original de la Russie sur le plan conceptuel. Mais sa visée propre est de relier les différents concepts originaux à la culture et à l’histoire qui les ont forgés. Dans la refonte de l’original russe on s’est attaché à faire ressortir la spécificité de cette philosophie et de ses conditions d’apparition. On trouvera parfois même certains grands événements dont l’incidence sur le développement ultérieur de la pensée est indiscutable (par exemple les Décembristes).

L’ambition de ce Dictionnaire est de faire pressentir la richesse d’un domaine philosophique qui commence à se découvrir de dépasser les jugements ou sympathies convenus, pour proposer un travail de compréhension en profondeur, offrant un nouvel angle d’approche de la culture russe.

A propos de l’auteur

Nadia Sikorsky

Nadia Sikorsky a grandi à Moscou où elle a obtenu un master de journalisme et un doctorat en histoire à l’Université d’État de Moscou. Après 13 ans passés au sein de l’Unesco, à Paris puis à Genève, et avoir exercé les fonctions de directrice de la communication à la Croix-Verte internationale fondée par Mikhaïl Gorbatchev, elle développe NashaGazeta.ch, premier quotidien russophone en ligne, lancé en 2007.

En 2022, elle s’est trouvée parmi celles et ceux qui, selon la rédaction du Temps, ont « sensiblement contribué au succès de la Suisse romande », figurant donc parmi les faiseurs d’opinion et leaders économiques, politiques, scientifiques et culturels : le Forum des 100.

Après 18 ans en charge de NashaGazeta.ch, Nadia Sikorsky a décidé de revenir à ses sources et de se concentrer sur ce qui la passionne vraiment : la culture dans toute sa diversité. Cette décision a pris la forme de ce blog culturel trilingue (russe, anglais, français) né au cœur de l’Europe – en Suisse, donc, son pays d’adoption, le pays qui se distingue par son multiculturalisme et son multilinguisme.

Nadia Sikorsky ne se présente pas comme une "voix russe", mais comme une voix d’Européenne d'origine russe (plus de 35 ans en Europe, passés 25 ans en Suisse) au bénéfice de plus de 30 ans d’expérience professionnelle dans le monde culturel – ceci au niveau international. Elle se positionne comme médiatrice culturelle entre les traditions russes et européennes ; le titre de sa chronique, "L'accent russe", capture cette essence – l’accent n’étant pas une barrière linguistique, ni un positionnement politique mais une empreinte culturelle distinctive dans le contexte européen.

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