RAYON LIVRES

Svetlana Alexievitch : la littérature au-delà de la littérature

Sous la direction de Jean-Philippe Jaccard, Annick Morard et Nathalie Piégay.

Svetlana Alexievitch est une auteure russophone majeure du XXe siècle, consacrée par le prix Nobel de littérature en 2015, dont l’œuvre explore les archives subjectives et la mémoire des anciennes républiques soviétiques. Elle a donné un grand nombre d’entretiens, à la presse russe en particulier, pour expliquer sa démarche et présenter la cohérence de son œuvre : peu d’entre eux sont traduits. Nous nous proposons dans ce volume de publier un de ses entretiens qui constitue une excellente présentation du travail de Svetlana Alexievitch. Intitulé « Le socialisme a disparu, mais nous sommes toujours là », il est paru en 2013 dans Droujba narodov (entretien avec Natalia Igrounova) et apporte des éléments importants sur la réception de son œuvre en Russie et ailleurs.

Le second texte inédit en français reproduit dans le volume est l’allocution que Svetlana Alexievitch  a donnée à l’Université de Genève lors de la réception de son titre de Docteure Honoris Cause en octobre 2017. Dans celle-ci, à teneur plus autobiographique, elle expose l’importance de son milieu d’origine, la valeur déterminante qu’a jouée la Deuxième Guerre mondiale dans son éducation et sa formation et des éléments de sa méthode.

Cette publication est accompagnée de six textes critiques et d’une lettre de Daniel de Roulet, qui mettent tous en valeur la dimension littéraire de cette œuvre. Si l’on a souvent mis en avant le caractère puissant des témoignages qu’elle constitue, on a trop peu accordé d’attention à l’ancrage de Svetlana Alexievitch dans la tradition européenne de l’écriture de l’Histoire. Il s’agira donc de considérer la force littéraire de l’œuvre de Svetlana Alexievitch , qui nous oblige à nous confronter aux violences historiques et politiques de notre temp mais aussi à nous interroger sur ce que peut la littérature face aux conflits armés (La Guerre n’a pas un visage de femme, Les Cercueils de zinc), à la catastrophe nucléaire de Tchernobyl (La Supplication), à la chute de la société et du régime soviétiques (La Fin de l’homme rouge). L’orchestration des voix et le montage des documents révèlent la puissance pathétique de ses récits : l’Histoire est perçue depuis l’expérience individuelle en marge de l’héroïsme et bordée par l’effacement.

Nathalie Piégay

A propos de l’auteur

Nadia Sikorsky

Nadia Sikorsky a grandi à Moscou où elle a obtenu un master de journalisme et un doctorat en histoire à l’Université d’État de Moscou. Après 13 ans passés au sein de l’Unesco, à Paris puis à Genève, et avoir exercé les fonctions de directrice de la communication à la Croix-Verte internationale fondée par Mikhaïl Gorbatchev, elle développe NashaGazeta.ch, premier quotidien russophone en ligne, lancé en 2007.

En 2022, elle s’est trouvée parmi celles et ceux qui, selon la rédaction du Temps, ont « sensiblement contribué au succès de la Suisse romande », figurant donc parmi les faiseurs d’opinion et leaders économiques, politiques, scientifiques et culturels : le Forum des 100.

Après 18 ans en charge de NashaGazeta.ch, Nadia Sikorsky a décidé de revenir à ses sources et de se concentrer sur ce qui la passionne vraiment : la culture dans toute sa diversité. Cette décision a pris la forme de ce blog culturel trilingue (russe, anglais, français) né au cœur de l’Europe – en Suisse, donc, son pays d’adoption, le pays qui se distingue par son multiculturalisme et son multilinguisme.

Nadia Sikorsky ne se présente pas comme une "voix russe", mais comme une voix d’Européenne d'origine russe (plus de 35 ans en Europe, passés 25 ans en Suisse) au bénéfice de plus de 30 ans d’expérience professionnelle dans le monde culturel – ceci au niveau international. Elle se positionne comme médiatrice culturelle entre les traditions russes et européennes ; le titre de sa chronique, "L'accent russe", capture cette essence – l’accent n’étant pas une barrière linguistique, ni un positionnement politique mais une empreinte culturelle distinctive dans le contexte européen.

L'AFFICHE